Le 18/06/2014 | Le cataclysme de l'honoraire à la boîte

L’évolution de la rémunération des pharmaciens, entérinée par l’assurance maladie avec un seul syndicat, introduit une part d’honoraire dans la rémunération qui devient mixte. 

L’introduction d’un honoraire de 1 € à la boîte aura des incidences importantes sur les conditions d’exercice des pharmaciens, notamment concernant le statut de commerçant, la valeur des fonds et la valorisation des stocks.  

Jusqu’à présent, les pharmaciens se rémunéraient au moyen d’une marge sur les produits vendus, comme les autres commerçants. En exerçant une activité commerciale, les pharmaciens bénéficiaient du statut protecteur des baux commerciaux et des règles relatives aux fonds de commerce. Cela leur assurait une stabilité quant à leur implantation ainsi qu’un financement et une transmission plus aisée de leur officine. Selon Maître Manry[i], l’introduction d’un honoraire à la boîte change la donne et risque de remettre en cause ce statut de commerçant. Or, la jurisprudence distingue les actes relevant d’une activité libérale, des actes relevant d’une activité commerciale. Si l’acte de commerce n’est que l’accessoire d’une activité libérale, le professionnel n’est pas considéré comme un commerçant.  Or, à partir du 1er janvier 2016, 47% de la rémunération des pharmaciens proviendront des honoraires de dispensation.  Le maintien d’une part de rémunération sur la marge ne pourra pas à elle seule permettre aux pharmaciens de conserver leur qualité de commerçant.

L’introduction d’une part importante d’honoraires aura pour conséquences l’effondrement du prix des fonds, la valeur des fonds étant calculée à partir du chiffre d’affaire. Bon nombre de  pharmaciens  ne pourront pas récupérer leur investissement de départ au moment de la revente. De la même façon, certains jeunes confrères remboursent actuellement des structures qui ne vaudront plus rien dans quelques années. Les banques risquent d’être de plus en plus réticentes pour accorder des prêts aux pharmaciens souhaitant s’installer. Le nombre de transactions, déjà en baisse, risque de s’effondrer.  Il nous semble primordial que le Ministère de l’économie et des finances s’empare du dossier et propose un réajustement de la valeur des fonds.

Enfin, la réduction du délai d’écoulement des stocks de 2 mois à 30 jours, en cas de changement de prix, aura une incidence négative sur la valorisation des stocks des officines.

Les pharmaciens seront incités à moins stocker afin de ne pas perdre de marge. Les achats en direct seront également réduits et du coup, les conditions commerciales accordées aux pharmaciens seront moins avantageuses. Cela entraînera non seulement une dévalorisation de la valeur des stocks, mais aussi un risque accru de ruptures d’approvisionnement et donc un problème de santé publique.

 

L’UNPF demande au Ministre de tutelle et à l’assurance maladie  l’ouverture de nouvelles  négociations, d’autant que les nombreuses pétitions envoyées par les pharmaciens montrent le rejet massif de cette réforme par la profession.



[i] Cabinet Havre Tronchet

 
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